Vieilles Silhouettes Arcachonnaises
CAZOBON, premier automédon
– Cazobon, qu’est-ce aco ?
– Té ! Vous êtes donc bien nouveau dans le pays pour n’avoir pas entendu parler de Cazobon et de sa chanson ? Eh ! bé ! pardi ! Cazobon ce fut, d’Arcachon, le premier automédon ! Car il ne faut pas vous figurer qu’Arcachon a toujours eu sa route en bitulite, son chemin de fer, ses locomotives, ses autocars… C’était un chantier pour y venir, même à l’époque où il commençait à prendre figure. On n’avait que le choix : s’embarquer dans une pinasse avec nos costaudes testerines, en culotte rouge, ou sauter dans la patache à Cazobon. Ah ! Cette patache. Ah ! Ce Cazobon ! Je ne les ai pas connus, je n’ai que soixante-quinze ans, c’est un peu court. Mais j’en ai tant entendu parler par mon père, que c’est tout comme. Cette pauvre patache, voyez-vous, c’est le progrès qui l’a tuée, comme il tue tant de choses. Elle reçut le coup mortel en 1856. Cette année-là, la première locomotive, à laquelle le père Deganne venait d’ouvrir un passage dans ses terrains, au fond d’une tranchée, entra en ronflant et sifflant, avec un bruit d’enfer, dans une baraque en bois, qui servait de gare provisoire à notre future ville ; cette année-là, la patache était condamnée. Les voyageurs, que le train laissait jadis à La Teste, point terminus de la ligne, ne démarraient plus de leurs banquettes et Cazobon se morfondait… Ah! Hill de pipe ! Il y en a qui bénissent le progrès, mais il y en a d’autres qui l’enverraient se faire une raison à Cadillac !…