21 août 1918
LA GRIPPE ESPAGNOLE À ARCACHON
Il y a ici depuis quelques temps une épidémie de grippe dite « espagnole » qui se porte sur les poumons ou sur l’intestin et qui fait de nombreuses victimes. Il meurt chaque jour plusieurs personnes. Les pompes funèbres ne peuvent suffir à enterrer les morts. Il y a 22 cadavres à enterrer et qu’on ne peut porter au cimetière. Les chevaux sont fourbus, car on manque d’avoine et les pauvres bêtes se traînent péniblement.
Pour le même motif l’entrepreneur de vidange ne peut faire son travail et il y à 492 fosses d’aisances à vider et qu’on ne peut vider. Tout cela constitue un danger public d’émanations malsaines qui ne doit pas peu contribuer à propager le fléau.
Les pommes de terre manquent depuis six semaines au moins. Les pauvres gens, déjà rationnés pour la pain, vivent d’une nourriture précaire et sont par leur faiblesse un terrain facile pour la contagion. Le maire a pris un arrêté, accepté par les curés, pour que les cadavres soient portés directement au cimetière sans passer par l’église.
Hier soir, à 8 heures, et tantôt sont passés deux enterrements venant de Saint-Ferdinand et doubles. Le curé de Saint-Ferdinand conduisait au cimetière deux corbillards à la fois.
En face de « Marie-Adèle », la villa « Sigurd» compte 11 malades soignés par deux infirmières. La situation est grave et oblige à des précautions. Les enfants vont cesser leurs bains de mer, abstention des crudités, fruits ou autres.
(Extrait des carnets inédits d’André Rebsomen, conservés par la famille Garros)
Publié dans le Bulletin n° 18 de la Société historique et archéologique d’Arcachon et du Pays de Buch.